Editorial
Texte: Gary Drechou
Photo: Heidi Diaz (SAM)

À charge de modération

«Faire mieux avec moins»? Dans le secteur de la santé, la lutte est engagée contre les actes et examens médicaux inutiles, et la tendance est à la modération.

Certes, le mouvement Smarter Medicine ne date plus d’hier – nous y consacrions déjà un dossier en 2015 – mais les appels au discernement, à la mesure, à une forme d’«inaction intelligente», se font de plus en plus présents. Des organisations de premier plan, telles que le CHUV et les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), n’hésitent plus à parler de changement de culture. Un nouveau «Serment suisse» a même vu le jour cet été, développé par l’Institut Dialog Ethik et soutenu par la Fédération des médecins suisses (FMH), qui engage, entre autres, à ne recommander ou à ne prendre que des mesures judicieuses.

Dans le sillon de ce mouvement, le «modèle du médecin tout-puissant qui dit au patient exactement ce qu’il doit faire» est ébranlé, souligne Wendy Levinson, l’une de ses figures de proue au Canada, et chaque citoyen-patient est invité à être moins «passif» dans la prise de décisions qui le concerne. Le mot d’ordre est simple: choisir avec soin. Pour l’appuyer, outre des listes de «mesures médicales généralement inutiles» par discipline, le site SmarterMedicine.ch met en avant cinq «bonnes questions» à poser à son médecin, qui visent à encourager une «franche discussion».

De franchise et de modération, il est aussi question sur la Toile. Alors que Google Maps incite tout un chacun à donner son «avis» sur tel ou tel établissement, ces évaluations sous la forme d’étoiles ou de commentaires ne sont sujettes à aucun filtre. Sous l’adresse d’un hôpital, par exemple, il n’est pas rare qu’un médecin se retrouve publiquement et nommément «sermonné», pris à parti ou décrié, parfois avec violence. Excès à bannir ou simples «coups de gueule au bar»?

S’il est nécessaire que les critiques s’expriment, les commentaires postés sur Google «ne laissent aucune chance à la relation, alors que la relation est une composante importante du succès thérapeutique», estime Thierry Currat, médiateur au sein de l’Espace Patients&Proches du CHUV. D’autres lieux et canaux dédiés existent, qui permettent de faire part de son expérience ou de ses doléances sans rupture de dialogue.

«Choisir avec soin», y compris ses mots, ses canaux d’expression et ses sources d’information, c’est déjà beaucoup en faire.



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Gary Drechou a rejoint l’équipe du Service de communication du CHUV voilà un an. Sa plume et son sens de l’éditorial en font un excellent observateur des problématiques liées à la médecine. C’est lui qui, désormais, conduira le magazine, toujours en collaboration avec l’agence LargeNetwork. Il signera également les éditoriaux, à l’invitation de Béatrice Schaad, cheffe du Service de communication du CHUV.