Chronique
Texte: VINCENT SCHNEEBELI

Coronavirus & psychiatrie : un crash test relationnel

VINCENT SCHNEEBELI, Directeur des soins de département

Pour déployer ses effets bénéfiques, le soin psychiatrique doit pouvoir s’appuyer sur certains ingrédients essentiels. La relation de confiance entre soigné et soignant en fait partie et se matérialise avec une certaine continuité, dans la durée. Sans cela, impossible d’envisager parcourir le chemin, souvent long, qui mène de la crise à un nouvel équilibre.

Mais du jour au lendemain, la pandémie de Covid-19 a imposé de fermer les consultations ambulatoires et hôpitaux de jour pour ne se concentrer que sur les urgences. Bien que cela ait eu pour but de protéger les patients d’un danger imminent, on pouvait légitimement craindre que l’état de santé de celles et ceux qui bénéficient de ces structures se dégrade, entraînant une hausse spectaculaire des urgences et une augmentation des hospitalisations.

Le scénario pessimiste ne s’est finalement pas confirmé. Il faut dire que, derrière leurs portes fermées, les soignants se sont réorganisés. Premier impératif : pour garder le lien, reprendre contact. Beaucoup de choses sont possibles par téléphone, y compris des consultations lorsque la situation l’impose. Ensuite les entretiens quotidiens par visioconférence, avec les patients, les familles, les proches. Puis la collaboration étroite avec les partenaires du réseau de soins dont l’hôpital fait partie et qui, ensemble, constituent le filet de sécurité autour de la personne psychiquement souffrante.

Même au sein de l’hôpital, le confinement, le port du masque et les mesures de distanciation sociale n’ont pas su éloigner les patients et les soignants. C’est même
le contraire qui s’est produit, puisque ces derniers ont compensé le stress lié à la situation par une intensification de leur présence auprès des personnes hospitalisées.
Au final, il y a la surprise. Celle d’avoir eu moins de patients hospitalisés, d’avoir mis sous tension le lien avec eux, sans que cela augmente massivement leur détresse.
Les uns et les autres ont saisi l’opportunité d’expérimenter et, ce faisant, ont découvert de nouvelles ressources, y compris en eux-mêmes. Le centre de gravité du dispositif psychiatrique s’est rapproché des patients, la continuité des soins a pu être garantie, et la relation est intacte. /



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