Parole d'expert
Texte: Gary Drechou
Photo: Gilles Weber (SAM)

Communiquer avec les patients en situation de handicap mental

Grâce à une formation innovante développée par le Centre des formations du CHUV en collaboration avec le Département de psychiatrie, les professionnels de la santé de l’institution peuvent acquérir des compétences clés pour communiquer efficacement avec les patients en situation de handicap mental.

La prise en charge des patients en situation de handicap mental lors d’un séjour à l’hôpital requiert du temps, ainsi que des compétences relationnelles et de communication spécifiques. Comment, par exemple, entrer en relation avec un patient lorsque celui-ci ne s’exprime pas verbalement? De quelle façon interpréter un changement de comportement chez un patient qui ne peut pas dire «j’ai mal»? Autant de situations où l’identification de la plainte, l’examen clinique et l’évaluation des besoins et des ressources peuvent s’avérer complexes pour les professionnels.

«Quels sont réellement les besoins du patient? Que se passe-t-il dans sa tête? Suis-je dans le bon raisonnement?», «Je ne sais pas si j’en fais assez ou trop»: ces témoignages de soignants illustrent une forme d’incertitude, une difficulté à se sentir pleinement à l’aise. Dans le contexte hospitalier, qui diffère de celui d’une institution spécialisée, cette difficulté à communiquer pourrait, dans certaines situations, compromettre l’établissement de soins personnalisés, conformes aux principes éthiques et aux bonnes pratiques.

S’exercer avec un patient simulé

La formation «Handicap mental – prise en charge et communication», offerte depuis un an par le Centre des formations du CHUV en collaboration avec le Département de psychiatrie, vise précisément à répondre à cette problématique. Animée en tandem par le Dr Jacques Baudat, médecin associé au Département de psychiatrie, et le Dr Nader Trigui, chef de clinique au sein de l’Unité de psychiatrie du développement mental des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), elle a déjà permis de former 44 collaborateurs-trices du CHUV.

Chaque session réunit une dizaine de participants et se déroule sur une demi-journée, en trois temps. Le «briefing», où les formateurs posent le cadre pédagogique en présentant une vignette clinique construite à partir de situations rencontrées, est suivi de simulations de 5 à 10 minutes où chaque participant se confronte à une personne en situation de handicap mental (patient simulé).

Le patient est incarné par un comédien spécialement entraîné à ce rôle par Emmanuel Bernaz, responsable du développement de la simulation dans la pédagogie clinique au sein du Centre des formations, et Jo Boegli, formatrice au programme des patients simulés de l’Université de Lausanne (UNIL) instauré en 2006. Suit enfin un «débriefing» en groupe.

«La simulation est une ressource pédagogique permettant de confronter le professionnel à ses compétences tout en garantissant sa sécurité, et le débriefing permet un regard réflexif sur l’action et la prise de décision au regard d’objectifs spécifiques et à la lumière de recommandations», note Emmanuel Bernaz.

Afin de permettre un transfert dans la pratique, les simulations doivent répondre à des critères de fidélité et de crédibilité très rigoureux. L’un des objectifs visés par ce type de simulation est par exemple l’identification des ressources à disposition dans la prise en charge des patients en situation de handicap mental, ou encore le recueil de données objectives.

Formation saluée

Proposée pour la première fois en juillet 2017 sous la forme de pilote, la formation «Handicap mental – prise en charge et communication» est née d’un travail de groupe du programme de MicroMBA du CHUV dont faisait partie Jacques Baudat, psychiatre spécialisé dans le handicap mental. La formation, incluant les concepts pédagogiques et la simulation, a ensuite été développée par le Centre des formations du CHUV en collaboration avec l’équipe du programme de patients simulés de l’UNIL. Elle a également été présentée à des membres de l’association insieme Vaud de parents et de personnes concernés par le handicap mental, qui ont salué son réalisme.

«L’utilisation de pratiques simulées en lien avec la prise en charge de patients en situation de handicap mental constitue une innovation, et le niveau de réalisme des vignettes cliniques est le fruit d’un long travail», souligne Muriel Gasser, responsable du domaine d’enseignement communication et collaboration au sein du Centre des formations du CHUV.



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