Health Valley
Texte: Céline Bilardo

A la conquête du cerveau humain

Dans la région lémanique, plusieurs projets prometteurs se concentrent déjà sur le développement de technologies neurologiques. Le Humain Brain Project vient aujourd’hui renforcer la position de centre d’excellence en neurosciences de la Health Valley.

«Nous connaissons mal notre cerveau.» Richard Frackowiak, chef du Service de neurologie au CHUV et cofondateur du Human Brain Project (HBP), mesure les défis du projet européen qu’il a initié avec Henry Markram de l’EPFL et Karlheinz Meier de l’Université d’Heidelberg. Objectif: fédérer plus d’un millier d’ingénieurs en informatique, d’experts en neurosciences cliniques et fondamentales pour comprendre la structure et le fonctionnement du cerveau humain. «Aujourd’hui, nous n’avons pas une vision globale du cerveau, de ses connexions et de son mécanisme précis.»

Primé par la Commission européenne, le Human Brain Project pèse un milliard d’euros, un budget réparti sur dix ans (à l’heure où nous mettons sous presse, ce budget est remis en question suite à l’acceptation de l’initiative anti-immigration en Suisse). Ce financement permettra d’intégrer dans un superordinateur toutes les données relatives à l’étude du cerveau des hôpitaux participants, afin d’en créer un modèle virtuel. «Si nous parvenons à notre but, nous pourrons utiliser ces informations pour mieux diagnostiquer et pronostiquer des maladies neurodégénératives. Mais aussi élaborer des médicaments plus efficaces et moins coûteux. A l’heure actuelle, pas moins de 35% des diagnostics de la maladie d’Alzheimer s’avèrent erronés!»

Le TEDx de Grégoire Courtine

Le HBP sera en partie coordonné depuis le Campus Biotech de Genève. Il illustre le travail d’innovation sur le cerveau qui est mené en Suisse romande: de Genève à Lausanne, en passant par Fribourg et le Valais, tous les laboratoires des institutions universitaires participent à l’essor des neurosciences dans la Health Valley. «La Suisse romande est particulièrement avancée dans l’application des recherches en neurosciences fondamentales vers les neurosciences cliniques», explique Michel Christoph, président de la Société suisse pour les neurosciences.

Grégoire Courtine, considéré comme l’un des chercheurs les plus prometteurs en neuroréhabilitation sur le plan international, mène à l’EPFL le projet «Re-walk», destiné à réhabiliter par neurostimulation des personnes victimes de lésions de la moelle épinière. Il a ainsi montré qu’un rat paraplégique pouvait retrouver petit à petit l’usage de ses jambes et les mouvoir volontairement. «Notre réussite se fait par palier. Après des tests sur les rats, nous menons des essais sur des singes, en collaboration avec le professeur Eric Rouiller à l’Université de Fribourg. Par ailleurs, huit patients volontaires du CHUV présentant des lésions incomplètes de la moelle testeront également notre système cette année.»

A l’heure actuelle, pas moins de 35% des diagnostics de la maladie d’Alzheimer s’avèrent erronés!

Environnement propice

Toujours sur le campus lausannois, la start-up Aleva Neurotherapeutics révolutionne, quant à elle, la technologie des électrodes implantées dans le cerveau. Elle a conçu une microélectrode capable de réduire drastiquement les effets secondaires d’un traitement d’une maladie neurologique telle que le Parkinson.

Jean-Pierre Rosat, son directeur, estime que le développement et le succès de la région lémanique comme centre d’excellence en neurosciences est le fruit d’un effort mené par le président de l’EPFL, Patrick Aebischer, depuis plus de dix ans. «Il a créé la faculté des sciences de la vie en 2002 et a tout fait pour y concentrer une masse critique suffisante: il a attiré les meilleurs ingénieurs du monde, capables de collaborer avec les meilleurs biologistes et médecins afin de pousser l’étude des neurosciences et son application clinique.»

Un avis que partage Patrik Vuilleumier, directeur du centre des neurosciences de Genève, actif dans l’utilisation de la neuro-imagerie pour l’observation des émotions. «La collaboration entre Lausanne et Genève contribue à cette réussite. Nous profitons de la proximité géographique pour l’échange de nos différentes compétences.»



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Primé par la Commission européenne, le Human Brain Project pèse un milliard d’euros, un budget réparti sur dix ans (à l’heure où nous mettons sous presse, ce budget est remis en question suite à l’acceptation de l’initiative anti-immigration en Suisse).