Interview
Texte: Melinda Marchese
Photo: Eric Déroze

«Plus c'est simple, mieux ça marche»

Nicolas Demartines défend une nouvelle approche multidisciplinaire pour diminuer les complications et la durée d’hospitalisation après une intervention chirurgicale.

A ce jour, plus de 1’500 patients ont déjà été opérés selon le protocole ERAS (Enhanced Recovery After Surgery) au CHUV depuis sa mise en place en 2011. Le Service de chirurgie viscérale que Nicolas Demartines* dirige figure parmi les premiers centres au monde à avoir instauré cette méthode aujourd’hui utilisée sur les cinq continents.

Concrètement, en quoi consiste la méthode ERAS?

Nicolas Demartines - Il s’agit d’une liste de 22 actes à effectuer avant, pendant et après l’opération, qui contribueront à une meilleure récupération post-opératoire. Ces éléments concernent les chirurgiens, les anesthésistes, le personnel infirmier et le patient lui-même qui est fortement impliqué. L’un d’entre eux consiste, par exemple, à ne pas laisser le patient à jeun de longues heures avant une opération. Nous lui donnons deux verres d’eau sucrée deux heures avant l’opération, et par la suite le nombre de perfusions administrées est adapté pour qu’il ne soit à aucun moment ni «trop sec», ni «trop plein de liquide». On s’assure que le patient mange un repas normal la veille de l’opération et qu’il se ré-alimente dès que possible: la nourriture stimule la régénération des muqueuses intestinales, ce qui peut aussi contribuer à augmenter les défenses immunitaires. De même, le patient est levé au fauteuil quelques heures après l’intervention déjà: la mobilisation aide énormément à la récupération.

Les soins sont-ils différents après l’opération?

Nicolas Demartines - Grâce aux progrès de l’antalgie (gestion de la douleur), nous parvenons à mieux calibrer le besoin de chaque patient en matière de médicament pour ne donner que les doses nécessaires au confort du patient. Au cours de la chirurgie, on ne pose pratiquement plus de drains préventifs, et la sonde gastrique est retirée en salle d’opération déjà.

Quels sont les bénéfices de cette méthode?

Nicolas Demartines - Cette méthode permet de diminuer le risque de complications de 40 à 50%, et la durée du séjour à l’hôpital passe de 10 à 6 jours en moyenne pour la chirurgie du colon et du rectum, par exemple. Le coût de la prise en charge diminue aussi de 2’000 à 7’000 francs par patient selon le type de chirurgie. En adaptant le protocole à chaque organe, ERAS peut être appliquée à toute sorte de chirurgie.

Cette approche simplifie la prise en charge. En a-t-on fait trop pendant des années?

Nicolas Demartines - Il est vrai que l’on a compliqué les choses pendant des années, cela pour des raisons historiques. Enormément de précautions étaient prises car les antibiotiques, les instruments de chirurgie et les sutures n’étaient pas aussi efficaces et sûrs qu’aujourd’hui. En 2015, on peut se permettre de penser qu’en matière de chirurgie plus c’est simple, mieux ça marche!

*Nicolas Demartines est le chef du service de chirurgie viscérale du CHUV.



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